Cioran et Jaccard, extra-lucides.
Je remets la main sur cet extrait d'un entretien de Cioran avec Sylvie Jaudeau datant de 1988, publié en 1990 dans un recueil "Cioran et le dernier homme" :
"J’étais passionné par mes études, j’avoue même avoir été intoxiqué par le langage philosophique que je considère maintenant comme une véritable drogue. Comment ne pas se laisser griser et mystifier par l’illusion de la profondeur qu’il crée ? Traduit en langage ordinaire, un texte philosophique se vide étrangement. C’est une épreuve à laquelle il faudrait les soumettre tous.
La fascination qu’exerce le langage explique à mon sens le succès de Heidegger. Manipulateur sans pareil, il possède un véritable génie verbal qu’il pousse cependant trop loin, il accorde au langage une importance vertigineuse. C’est précisément cet excès qui éveilla mes doutes, alors qu’en 1932, je lisais Sein und Zeit. La vanité d’un tel exercice me sauta aux yeux. Il m’a semblé qu’on cherchait à me duper avec des mots. Je dois remercier Heidegger d’être parvenu, par sa prodigieuse inventivité verbale, à m’ouvrir les yeux. J’ai vu tout ce qu’il fallait à tout prix éviter."
Et donc, dès 1932, Cioran ne fut en rien dupe du grand philosophe nazi, icône de la camarilla philosophique germano-pratine jusqu'au début du siècle présent. Pour certains de ses membres, aujourd'hui encore, quand bien même ne subsiste aucun doute sur la nature du personnage, de son engagement, de ses écrits.
Apparemment son nom n'évoque en rien les fameuses "heures sombres de notre histoire"...
De lucidité, le cher Roland Jaccard n'en était point dépourvu, lui, qui confessait volontiers "donner tout Heidegger pour quelques aphorismes de Cioran". ( in L’homme élégant, avec Romain Slocombe, 2002).
J'ai perdu le nom de l'auteur de ce portrait... italien sauf erreur.
D'avance merci pour toute précision bienvenue !
Après des petites recherches voici le peintre en question, un Italien effectivement : https://www.artmajeur.com/fabrizio-cassetta-lautir/fr
RépondreSupprimer(Heureux du retour de vos petits billets.)
Grazie mille ! un oubli fâcheux ainsi vite réparé... Je m'étais seulement absenté... une forme d'auto-censure dictée par ce que Machiavel appelait "la qualité des temps"... À croire que mon quantum d’écœurement n'est pas épuisé...
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