Style et style.

Évidemment les temps s'y prêtent mal. Ce qui justifie qu'on s'y arrête.
Mot et chose, nature ou habitude, le style est anachronisme dans une époque où les arbitrages - quand ils s'effectuent ... - ne s' opèrent plus entre élégances mais entre vulgarités. À Des Esseintes succède ... qui vous voulez en fait !
Ainsi en littérature. Le panurgisme critique encense hebdomadairement tel ou telle pour son brilliant, son art pour mettre en formules, d'autant plus saluées qu'elles sont médiatiques, l'air du temps. Ou supposé tel. L'élément de langage en est alors le couronnement suprême.
Et que dire des sempiternels aventuriers autour de leur nombril, forcenés de l'auto-fiction, Ulysses en chambre dépourvus d'Ithaque ? Un fléau.
Tiédasses parfois, vulgaires souvent, toujours sans grand intérêt, ces gens encombrent plateaux télé et colonnes papier. Aucune importance. Même si dans les meilleurs des cas, leur vernis peut presque les nimber du halo du style.
Tout autre affaire est d'avoir un style.
Foin de truquages et de trucs, foin de technique. Proust l'avait déjà relevé, qui disait qu'avoir un style n'était pas affaire de technique seule mais surtout affaire de vision.
Sans elle, trois petits points ne sont que tics, le balancement de phrases infinies errance le long de phrases interminables, sans elle aucun intérêt, aucune valeur. Et un plaisir de second ordre.
Car avoir un style, c'est rendre une voix inconfondable avec une autre. Par delà les années et les continents.
Et c'est ainsi que le petit Marcel et le grand Ferdinand (par ordre chronologique...) planent au-dessus de la littérature française du siècle passé.

Pour le plaisir, car tout y aboutit, deux, trois lignes.
"Un arbre étriqué, les branches levées comme d'un vieillard qui se peigne, ramenait ses mèches parcimonieuses d'un seul côté de la lumière".
Cher Antoine Blondin, parti il y a vingt-cinq ans.


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