Larme d'érotisme sinon d'Éros...

"N'avez-vous pas remarqué parfois que dans la rue, quand elle va à l'église ou ailleurs, quand elle joue, ou pour une autre cause, il arrive qu'une femme soulève sa robe si haut que, sans y penser, elle montre le pied, et souvent un peu de la jambe ? Le plaisir qu'elle donne ainsi à l'heureux spectateur est-il celui de la révélation furtive d'un peu de nature nue ? 

Ne vous semble-t-il pas qu'elle a une grâce extrême si on la voit ainsi, avec une certaine disposition féminine élégante et recherchée, dans ses escarpins de velours et ses bas bien propres ?"

Le Livre du Courtisan, Livre I, 40.


À deux siècles et une poignée d'années de distance, comme un clin d’oeil, une correspondance - pour le dire comme ...Baudelaire ! - entre ces lignes tirées du chef d’œuvre de Baldassare Castiglione, et l'immortelle passante des "Fleurs du Mal."

Une larme d'érotisme dans un océan de pornographie...


La rue assourdissante autour de moi hurlait.

Longue, mince, en grand deuil, douleur majestueuse,

Une femme passa, d'une main fastueuse

Soulevant, balançant le feston et l'ourlet;


Agile et noble, avec sa jambe de statue.

Moi, je buvais, crispé comme un extravagant,

Dans son œil, ciel livide où germe l'ouragan,

La douceur qui fascine et le plaisir qui tue.


Un éclair... puis la nuit ! - Fugitive beauté

Dont le regard m'a fait soudainement renaître,

Ne te verrai-je plus que dans l'éternité ?


Ailleurs, bien loin d'ici ! trop tard ! jamais peut-être !

Car j'ignore où tu fuis, tu ne sais où je vais,

Ô toi que l'eusse aimée, ô toi qui le savais !




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