Un ami qui vous fait du bien.

"Je regardais le livre que je n'avais pas encore ouvert, me réservant l'occasion solennelle pour seulement un beau et rederidable moment dans le genre de celui que je décris, auquel on n'accède pas comme ça en claquant des doigts ou en l'ayant décrété d'avance.
Et puis j'ai coutume de me faire désirer par ce que je vais découvrir, et réciproquement. Il est rompu à jamais le charme de pouvoir délirer sur un livre avant de l'avoir lu.
Les meilleurs livres, il est au fond bien triste de les avoir toujours déjà lus, trop tôt dévorés d'un coup, sans souci de temporiser.
Gardons-nous de lire trop vite.
Rêvons les livres avant d'enfin les lire - c'est ma foi plus sage et réjouissant que de pénétrer par effraction dans des terres inconnues pour faire le malin.
Rien n'est plus beau qu'un livre encore inconnu, deviné merveilleux. Si on ne sait pas prendre tout son temps, on ne saura jamais lire. Mais la plupart lisent comme ils mangent, comme des lance-pierres dit-on par ici, si vite, et n'y reviennent plus - surtout ils mangent ce qu'on leur donne à manger. Ils n'ont pour la plupart aucun goût. Mais jugent du vôtre, taxent et amendent vos enchantements, font la leçon.
Pauvres types.
Quand je lis, je prends tout mon temps et je le froisse, l'écrase en cent mille plis, et le jette par dessus mon épaule. (…)
C'est comme quand on écrit. Avant de s'y mettre avec tout le pseudo-sérieux que ça réclame, il faut rêver tous les livres impossibles que pourrait devenir ce qui, quand on s'y sera mis, n'a que peu de chance de devenir un livre. Et puis quand on va pouvoir s'y mettre, alors on en écrit un autre, qu'on n'attendait certes pas, et ce livre devient souvent misérablement possible, il génère déjà d'autres rêves de livres inattendus à chaque mot, qui nous emportent fabuleusement
- ou bien nous ratatinent."


Il y a des êtres, comme ça, qu'on regrette d'avoir découvert et connu beaucoup trop tard. Qui nous enrichissent par des écrits, par des conversations, nous rehaussent dans notre estime de soi au vu des intérêts - musicaux, littéraires, ... - que l'on partage, des aversions - nombreuses - nourries par un quotidien politique, culturel (?) qui n'est pas notre.

Bref, presque une âme sœur. Si tant est que...

J'ai mis un peu de temps à comprendre que l'ami Louis ne faisait qu'un avec Dominique Poncet. 

Et je l'ai lu.

Je m'en serai voulu de ne pas partager avec les quelques fous de littérature qui fréquentent ce lieu ces lignes. Le reste du bouquin est magnifique, éclats d'une enfance riche de grand-parents aimants, dans une campagne qui a quelques traits communs avec la nôtre.

Décidément, un type qui s'intéresse à Moondog ne pouvait pas être médiocre....



Dominique Poncet, Les pentes fabuleuses, Éditions Comp'Act. 2003.


Introuvable en librairie, on peut aisément se procurer l'opus sur le site chasse-aux-livres.fr , caverne d'Ali Baba qui regorge de trésors musicaux et littéraires rares ou épuisés.

Découverte sur le conseil de Louis Watt-Owen.

Un ami précieux, vous disais-je...






Commentaires

  1. Cher Luc-Antoine, vous savez que comme vous, j'aime , le mot est faible, lire et relire LWO. Peu de lecteurs mais des lecteurs de qualité, Julien Gracq lisait Dominique Poncet.
    Bon printemps sur votre île
    Lucm

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  2. Partager avec vous de affection envers un être de la qualité humaine tel que le cher Louis, est plus qu'un plaisir, cher Lucm... une joie ! Merci encore !

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