Apostille au billet précédent, Flaubert suite.

Flaubert échappe donc aux griffes du redoutable et grotesque Pierre Ernest Pinard.
Lequel n'abdique pas et voit à la parution des Fleurs du Mal l'occasion d'une revanche.
Ainsi, toujours tirée de la passionnante correspondance de Flaubert, cette lettre à Charles Baudelaire en date du 14 août 1857 :
"Je viens d'apprendre que vous êtes poursuivi à cause de votre volume. La chose est déjà un peu ancienne, me dit-on. Je ne sais rien du tout, car je vis ici comme à cent mille lieues de Paris. 
Pourquoi ? Contre qui avez-vous attenté ? Est-ce à la religion ? Sont-ce les moeurs ? Avez-vous passé en justice ? Quand sera-ce ? etc. 
Ceci est du nouveau : poursuivre un livre de vers ! Jusqu'à présent la magistrature laissait la poésie fort tranquille. 
Je suis grandement indigné. Donnez-moi des détails sur votre affaire, si ça ne vous embête pas trop, et recevez mille poignées de main des plus cordiales. 
      À vous."

"Vous êtes résistant comme le marbre et pénétrant comme un brouillard d’Angleterre", lui avait-il écrit le mois précédent, à la réception de l'ouvrage. Rien n'y fit : Baudelaire sera condamné par un jugement d'août 1857 à trois cent francs d'amende et verra six de ses poèmes interdits de publication.
Ils le demeureront jusqu'à ce que ce jugement soit cassé, en....mai 1949 !
Légendaire diligence de la justice française.

Pierre Ernest Pinard, quant à lui, sera nommé Ministre de l'Intérieur en 1867, précédant à ce poste un nombre respectable de crétins.
Il n'y a apparemment pas de raison à voir une telle tradition s'interrompre...










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