Apostille au Maradona de Philippe Vilain.
1970 : Pasolini est au Brésil pour le tournage de son "Médée". Il en profite pour s'échapper à Mexico et assister à la finale de la Coupe du Monde opposant le Brésil et l'Italie.
On en connaît le résultat : le Brésil surclasse une Italie épuisée par sa demi-finale contre la RFA - autre match de légende.
Pasolini a sous les yeux la plus grande et plus belle équipe nationale de l'histoire - on nous laissera, puristes et fêlés, nous écharper sur qui de la Hongrie 54, du Brésil 58, de la Hollande 74....
Connaît-il à cette occasion son syndrome de Stendhal footballistique ?
Naît chez lui en tous cas sa conception de la distinction entre le football en prose et le football poétique : Vilain présente d'ailleurs celle-ci de manière fort intelligente dans son bouquin.
Résumons : pour Pasolini le foot de prose, c'est l'organisation collective, les enchaînements de passes, etc.; le foot de poésie, c'est ce qui brouille les codes : les dribbles, les feintes, les actions qui échappent à toute logique. Ce 4-1 pour le Brésil signifie la victoire et la supériorité du football poétique qui a terrassé le "catenaccio" italien, paroxysme du jeu défensif défini par les Italiens à partir du schéma du "verrou" mis au point par un entraîneur suisse, Karl Rappan.
Pasolini, qui n'a rien oublié du marxisme, de ses infrastructures et de ses superstructures, analyse ces différences de philosophie de jeu au moyen des circonstances sociales, historiques, politiques propres à chaque continent et à chaque culture : "Pour des questions de culture et d'histoire, le football de certains peuples est fondamentalement en prose : prose réaliste et prose esthétisante (ce dernier cas est celui de l'Italie), alors que le football d'autres peuples est fondamentalement en vers (c'est le cas du Brésil)".
Ainsi voit-il le football en prose basé sur le jeu collectif et organisé dans les moindres détails.
À l'inverse, la poésie naît de l'individualisme avec le but, la passe inspirée, le dribble. C'est "l'ineffable, l'inspiration individuelle, le coup de génie."
Pelé et Maradona.
Je vois bien tout ce qu'a d'oiseux un tel débat à l'heure où les médias ne vibrent que de la valeur de la montre qu'arborait Benzema lors de la récente remise de son Ballon d'Or, du montant réel des émoluments annuels de M'Bappé - 120, 130 millions d'euros, plus que Messi ou Ronaldo ?, lequel fait vendre le plus de maillots ?
Je ne savais pas que PPP avait théorisé la stratégie footballistique. Mais pas étonné. Par contre je crois qu'il n'était pas très doué avec des crampons. La fréquentation des terrains lui permettait surtout de se frotter à un milieu qui l'intéressait (et puis de lever quelques gitons sans doute). Camus, lui, était un bon gardien il paraît. Là encore rien d'étonnant, pour un type qui ne laissait passer aucun but à l'existence.
RépondreSupprimerPasolini était un footballeur plus qu'honorable, dit-on... Camus était sans doute meilleur "garde but" comme l'on disait en son temps qu'écrivain...
RépondreSupprimerJ'ai l'impression que vous pensez que j'attaque tout ce que vous aimez. Que mes commentaires (qui me semblent tout à fait décontractés quand je les écris) vous mettent sur la défensive. Je m'accorde toujours la possibilité d'évoquer (aussi) les défauts de mes "idoles". J'aime Pasolini, j'aime Camus (vous avez bien sûr le droit de penser qu'il vaut pas un clou). Quant à Cioran et La Rochefoucauld je n'irai nulle part sans eux. Je dis ça... Vous en faites ce que vous voulez. Si vous trouvez mes propos parfois désagréables dites-le moi et je disparaîtrai ^^
RépondreSupprimer(Mais je continuerai à vous lire, les gens avec qui je suis toujours d'accord m'intéressant moins.)
Mais absolument pas !!! Désolé de vous avoir donné ce sentiment ! Je vous lis, vous publie et vous réponds systématiquement car je m'enrichis dans nos échanges ! Je suis même désolé de ne pas savoir où vous lire...
SupprimerVous me lisez, vous savez donc le bonheur de lecture que je puise chez Cioran et La Rochefoucauld, comme vous sûrement...
Blague à part : sur Pasolini, j'ai véritablement lu qu'il était bon joueur.
Quant à Camus, c'était ce que les Italiens appellent "una battuta", à mi-chemin entre un bon mot et une plaisanterie, sorte h'humour à froid sans jamais être méchant. Bon, j'avoue, Camus n'a jamais été ma tasse de thé, même si je nourris une aversion profonde pour Sartre !
Manifestement, j'ai merdouillé... Sans rancune ? 😉
Non non ce doit être moi. Je suis peut-être un peu soupe au lait ^^
SupprimerIntéressante cette "battuta". Je ne connaissais pas du tout.
J'entretiens d'étranges relations avec Sartre et Camus. Beaucoup de leurs romans m'ont marqué (surtout dans ma jeunesse pour le premier), alors qu'ils ne gravitent même pas à la lisière du cercle restreint de mes auteurs de chevet. De Camus je garde encore pourtant certaine atmosphère, des bains, du soleil sur la mer...
A propos du JP — et de sa Simone — je ne me lasse jamais de ce portrait de Truman Capote (in "Prières exaucées") : "A l'époque le Pont-Royal avait un petit bar en sous-sol aux fauteuils de cuir qui était l'abreuvoir préféré des grands mammifères de la haute bohème. Un œil noyé, l'autre à la dérive, ce louchon de Sartre, pipe au bec, teint terreux, et sa taupe de Beauvoir, sentant la jeune fille prolongée, étaient généralement calés dans le coin comme deux poupées de ventriloque abandonnées." (Un régal ce livre.)